En tant qu'Entreprise à mission, Kéa a décidé de contribuer à sa manière aux grands sujets économiques & sociétaux et propose un décodage inédit.
Chères lectrices et chers lecteurs,
En cette semaine de printemps et d’éveil de la nature, les associés de Kéa stridulent, caquettent de joie et décryptent les faits suivants :
Cui-Cui, c’est le patron ?
Dirigeants, soyez visionnaires : intégrez la Nature dans votre entreprise. Mais comment ? Frantz GaultetJérôme Giusti proposent trois modèles. Le premier : l’écosystème représenté au Conseil d’Administration des entreprises – souvenez-vous du Parlement des Choses de Bruno Latour. Deuxième modèle : la Nature considérée comme un organisme individuel, c’est-à-dire comme un salarié. Eh oui ! Et, si vous vous posiez la question, les éco-syndicats existent déjà en France. Troisième modèle : des communautés biotiques locales dotées d’une existence juridique. Expliqué autrement, « c’est pas l’Homme qui salarie la Nature, c’est la Nature qui salarie l’Homme », comme pourrait le dire le chanteur Renaud. Le fleuve Whanganui, en Nouvelle-Zélande, a obtenu une véritable personnalité juridique et récupéré, du même coup, non seulement la propriété de son lit, mais également celle de son corps, donc des biens et services qu’il produit. Il peut signer des contrats, engager des actions en justice, ou bien même, investir dans d’autres entreprises. Ecosystème, organisme individuel, communauté biotique locale… Kevin Levillain, enseignant à l’Ecole des Mines-Paris PSL, rappelle la question centrale : le dirigeant sait-il pour qui il travaille ?
Co Co Co CODIR
En l'absence de syndicats (seuls 10 % des salariés environ sont syndiqués), l’entreprise doit replacer la négociation collective au centre de son fonctionnement pour concilier efficacité et intérêt des travailleurs. Jacques Barthelemy, avocat en droit social, et Gilbert Cette, professeur d'économie, appellent de leurs vœux une nouvelle strate de coopération visant à donner plus de liberté aux entreprises après les premières modifications des ordonnances Travail de 2017. Le CSE pourrait l’incarner en devenant l'instance clé de négociation, prévalant sur l’accord de branche, pour les décisions sur le collectif de travail (les négociations salariales par exemple). De quoi se projeter, comme la sociologue Isabelle Ferreras, vers un système bicaméral où le Conseil d’Administration et le CSE prendraient, ensemble, toutes les décisions sur le capital et le travail dans l’entreprise ? Sans transformer l’entreprise en paradis rouge, le CSE pourrait au moins constituer un « shadow codir», pour faire miroir au CA. Administrateurs, n’en prenez pas ombrage.
Cyber-punaises
Les cyberattaques connaissent une recrudescence sans précédent : rien qu’au mois de mars 2024, 800 sites gouvernementaux et ministériels français ont été touchés par une attaque d’une « intensité inédite ». Part croissante de l’économie du crime et moyen de déstabilisation massif des économies modernes, les cyberattaques sont désormais au centre de l’échiquier géopolitique mondial. Si le procédé est employé par tous les États, on retrouve tout de même la Chine et la Russie aux avant-postes, aussi bien quand il s’agit de cyberattaques à visées mercantiles (extorsion et détournement de fonds) ou avec un objectif de nuisance massive (paralysie d’hôpitaux ou désinformation à grande échelle). Toutefois, comme nous l’explique Martin Untersinger dans son livre consacré au sujet, nombre d’entre elles passent sous les radars, soit parce qu’elles ne sont pas découvertes, soit parce qu’elles sont gardées secrètes. Les punaises de lit dans le métro et les cinémas parisiens avaient, elles aussi, d’après les services français un petit accent russe. Histoire de déstabiliser Paris avant les JO… On est dans de beaux draps !
Donald, fais-moi un cygne !
Le mage (R)oubini fait de Trump II « la première menace économique mondiale ». En cause : l’agenda protectionniste du candidat, la promesse de faire passer à 10 % les droits de douane sur les produits importés (contre 2 % aujourd'hui) et d’instaurer des blocus sur certaines importations chinoises. Guerres commerciales, croissance affaiblie, inflation croissante. Nouriel Roubini est l’homme qui annonce les crises. Il ajoute aux cygnes noirs de Nassim Nicholas Taleb, ces catastrophes économiques imprévisibles, le cygne blanc, la catastrophe annoncée, les résultats prévisibles d'erreurs politiques. En l’occurrence ici, le cygne est plutôt orange et ébouriffé pour Trump. Vite, le chant du cygne !
Angry Birds
Savez-vous quelle est l’émotion de notre temps ? La colère. Après la colère des paysans, la colère des infirmiers et la colère des contrôleurs de la SNCF : les bandeaux des chaines d’info la déclinent en boucle. Les fury rooms, où l’on paie pour tout casser, ne désemplissent pas ; Gérard Larcher, président du Sénat, enjoint à Jean-Luc Mélenchon de « fermer sa gueule » ; Michel-Edouard Leclerc va aller « casser la gueule à l’inflation »… Le sentiment de colère serait partagé par 45 % des Français (+9 % en un an). La 15e enquête du CEVIPOF montre qu’il s’alimente (dans l’ordre) de la méfiance, la lassitude, la morosité et la peur, en fortes hausses. La colère est l’émotion qui circule le mieux et le plus vite sur les réseaux sociaux. Mais, outre le fait qu’elle alimente le vote populiste, la colère, souvent stérile, peut avoir des vertus : c’est l'émotion qui semble le mieux fonctionner pour passer à l’acte en matière d’écologie, plus que la peur ou l’espoir. Soyons verts de rage !
Bonne lecture,
Les associés de Kéa
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Rédacteurs en chef : Sophie Combes et Romain Thievenaz
Rédacteurs : Pierre Girard, Alexis Heuls, Jean Gaboriau, Mathieu Noguès
Secrétaires de rédaction : Marie Guilbart, Wendy Röltgen
ont collaboré à ce numéro : Thibaut Cournarie, Brice Gaudin, Tom Jacques, Stéphanie Nadjarian, Yves Pizay, Paul Puechbroussou, Chloé Secnazi
Directrice de la diffusion : Iliana Ohleyer
NB : ce bulletin est rédigé par les équipes Kéa
1er cabinet de conseil européen "société à mission", le Groupe Kéa est reconnu pour apporter aux dirigeants des solutions créatives et trouver les modèles qui feront l'économie de demain. Sa raison d'être : entreprendre les transformations pour une économie souhaitable.