En tant qu'Entreprise à mission, Kéa a décidé de contribuer à sa manière aux grands sujets économiques & sociétaux et propose un décodage inédit.
Chères lectrices et chers lecteurs,
En cette semaine de Saint-Valentin, les associés de Kéa vous envoient tout leur Amour et les mots doux suivants :
Maman, j’ai raté le sommet de l’IA à Paris – L’œil de notre correspondant sur place, Nicolas Miailhe
Initialement créé pour permettre aux acteurs de l’IA de déterminer des règles de sécurité, le sommet de l’IA, qui a eu lieu cette semaine à Paris, s’est transformé en « Choose France ». Et c’est autant une bonne qu’une mauvaise nouvelle.
Entre les serrages de pince diplomatiques et le sales tour, notre Président a joué son meilleur rôle de VRP : « Choose France » pour « plug » les IA sur le nucléaire et « Choose France » pour attirer les investisseurs étrangers. Et il a bien raison : la France ne manque pas d’atouts. Aujourd’hui au 5e rang mondial, elle peut compter sur ses talents créatifs, ses ingénieurs et ses idées, et sur son énergie décarbonée dans une course où l’ampleur des investissements est trop mise en avant et où l’on oublie qu’il vaut mieux faire partie du peloton de tête plutôt qu’être tout premier (pour profiter des bonds technologiques des autres).
Mais fallait-il pour autant oublier les fondamentauxde ce sommet qui s’inscrit avant tout dans la continuité du AI Safety Summit de 2023 à Bletchley Park au Royaume-Uni, berceau de la machine de Turing ? La symbolique historique témoignait d’une volonté claire : mettre la machine au service du « Bien » en élaborant une éthique et en travaillant à se prémunir contre les risques de l’IA.
La volonté obsessionnelle de rattraper les États-Unis et la Chine ne doit pas nous faire oublier notre avantage compétitif en termes de régulation et de sécurité, essentiel pour développer des IA alternatives au service de nos fleurons industriels, Airbus et Thalès par exemple. Alors, embrassons l’« en même temps » de la performance et de la sécurité.
Balance, baby, balance.
Nicolas Miailhe est Cofondateur de PRISM Eval, une start-up parisienne spécialisée dans la sécurité et le contrôle des systèmes d’IA avancés.
Ah, ça IA, ça IA
Où résidera le pouvoir à l’ère de l’IA transformatrice ?
Pour répondre à cette question, Anton Korinek et Joseph Stiglitz proposent une lecture historique de l’économie, reposant sur l’importance des « facteurs (de production) limitants » et de ceux qui en sont les propriétaires.
Jusqu’à la révolution industrielle, la terre était limitante et valait cher et le travail valait peu. Le progrès connu à l’ère industrielle a renversé cela : le travail est devenu un facteur limitant face à un capital reproductible. Les salaires ont augmenté, le niveau de vie s’est amélioré. Enfin, à l’ère de l’IA transformatrice, se produit un bouleversement : le travail serait reproductible et les ressources rares deviendraient la terre, les matières premières et l’énergie.
Quelles conséquences cela a-t-il ? Une explosion des inégalités (intra-nationales et internationales) et la crise démocratique. Ceux qui ne possèdent que le travail sont dévalués, à la fois économiquement (ils perçoivent de maigres revenus ou les perdent) et socialement (leur temps n'a plus de valeur sociale). Au contraire, ceux qui possèdent les facteurs limitants renforcent leur emprise sur la société.
Ah, ça IA, ça IA, les technoligarques à la lanterne...
Oui, chef, oui
Voilà que l'armée donne à toute la société des leçons de management.
A l’heure où les opérations militaires belliqueuses s’accélèrent, on observe que se développent instruments de suivi et de contrôle, normes et principe de précaution. L’armée entreprend une réforme de ses principes de commandement : le commandement par l’intention (CPI). Elle réactive ainsi l'esprit d'initiative cher à sa tradition mais dévoré par la lourdeur des procédures.
Ce principe consacre l'objectif et la clarté de l'ordre, puis sa mise en œuvre selon un principe de subsidiarité et d'initiatives adaptées au niveau de responsabilité. Le CPI est donc à la fois un principe, une méthode à apprendre et une discipline active. Il est aussi un défi commun à toutes les organisations. Car le plus innovant est que la Grande Muette veuille partager et même co-construire cette réforme main dans la main avec l'ensemble de la société et notamment avec le monde de l'entreprise.
La simplification sera-t-elle le moyen d'accepter de ne pas savoir tout prévoir sur tous les fronts?
Chef sachant cheffer cherche chubalterne chympa (allez, on répète plus vite !).
Attention à la Tesla
Qui mérite de vivre ?
A travers la mise en scène d’un véhicule autonome contraint de percuter un ou plusieurs individus, une équipe internationale de chercheurs a récolté plus de 40 millions de décisions dans 233 pays ou territoires illustrant nos choix moraux. Prenez deux secondes pour décider à qui vous sauveriez la vie : 3 personnes âgées ou 2 enfants en bas-âge ? Deux personnes qui ont traversé la rue au feu rouge ou celle qui a traversé au feu vert ?
Si tout le monde est d’accord pour sauver les humains en priorité (désolés, BB !), les chercheurs mettent en avant trois clusters moraux: un clusteroccidental,proche des préférences moyennes, composé de l’Amérique du Nord et de nombreux pays européens (sans la France) ; un clusteroriental (culture confucianiste et islamique) où l’on préfère sauver les vieux plutôt que les jeunes, les hommes plutôt que les femmes mais où l’on ne se soucie guère de la forme physique des personnes ou de leur statut social ; enfin, un clusterméridional– Amérique Latine, Maroc, Algérie et France – en opposition au cluster oriental pour ce qui concerne les quatre dilemmes précédemment évoqués, où l’on préfère les femmes, les jeunes, les riches et les minces.
Et vous ? Que choisiriez-vous ? Nous, on sauvera Mirza bien sûr.
Allons Enfants
Êtes-vous comme nous et vous réveillez-vous chaque matin exsangue, en découvrant une nouvelle information rocambolesque en provenance de Trump et de ses acolytes ?
Comme des poulets sans tête, nous passons nos journées à les commenter, au lieu de « juste tourner la tête et continuer à travailler » comme le suggérait Sam Altman cette semaine à propos d’Elon Musk ?
Petit manuel pour éviter un bug généralisé :
1. Choisir ses combats, ne s’exprimer que sur son champ de légitimité
Évitons le jeu du « Flood the zone with shit » (sic Steve Bannon) et de surréagir. Jouons le jeu du crédit légitime sur nos expertises authentiques.
"Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
S’introduisent dans les affaires :
Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés."
(Le Coche et la Mouche, La Fontaine)
2. Construire et incarner une vision
Face à la tactique transactionnelle, immédiate et opportuniste, et au bluff généralisé, jouons le jeu de la vision long-terme expliquée. Nos compatriotes ont besoin de sens et de compréhension. Selon Xavier Fontanet, la bataille d’Austerlitz a été gagnée parce que l’empereur Napoléon a expliqué lui-même, la veille, à chaque corps d’armée, la stratégie qu’il comptait mettre en œuvre.
3. Augmenter ses forces plutôt que chercher à corriger ses faiblesses
Un tiers de contention, deux tiers d’extension, nous enseigne la sociodynamique. La France manque moins d’atouts que de courage pour écrire son récit national… et nous avons le savoir-faire en transformation pour fédérer et engager les Français dans un véritable changement.
Marchons, marchons !
Les associés de Kéa
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Secrétaires de rédaction : Marie Guilbart, Irène Miquel
Ont collaboré à ce numéro :Oualid Essaid, Jean Gaboriau, Marie Guilbart, Carine Lesigne, Yves Pizay, Paul Puechbroussou, Stéphanie Nadjarian, Romain Thievenaz, Jérémie Viel
Directrice de la diffusion : Iliana Ohleyer, Wendy Röltgen
1er cabinet de conseil "société à mission", le Groupe Kéa est reconnu pour apporter aux dirigeants des solutions créatives et trouver les modèles qui feront l'économie de demain. Sa raison d'être : entreprendre les transformations pour une économie souhaitable.