En tant qu'Entreprise à mission, Kéa a décidé de contribuer à sa manière aux grands sujets économiques & sociétaux et propose un décodage inédit.
Chères lectrices et chers lecteurs,
En cette semaine d’imbroglio sur le salut nazi de Musk, les associés de Kéa gardent les mains dans les poches et rappellent que jeux de mains…
Petit manuel de survie pour 2025
La broligarchie libérée arrive au pouvoir aux USA et, comme le dit Joseph Stiglitz, « la liberté totale pour les loups, c'est la mort pour les agneaux ».Mais alors, comment survivre dans ce milieu hostile ?
Dans The Guardian, Carole Cadwalladr nous donne 20 clés pour faire face aux broligarches, ces magnats de la tech amis de Trump qui mobilisent argent, moyens de communication et pouvoir politique au profit d’une idéologie masculiniste et libertarienne. La fermeté de ses recommandations témoigne de la gravité de l’enjeu.
En voici quelques-unes : 1/ Y croire. Oui, Trump souhaite vraiment annexer le Canada. Plus c’est gros, plus ça passe. L’ambiguïté permet de parler à tous. Il faut tout prendre au premier degré et ne pas masquer la vérité. 2/ Prendre conscience de notre pouvoir d’action : Musk et Trump ne sont ni des dieux, ni tout-puissants et la vérité existe. 3/ Protéger notre vie privée et nos données personnelles « comme si la Stasi nous écoutait ». 4/ Ne pas rompre les liens et trouver un moyen de nous connecter avec ceux qui ne sont pas d’accord : « on ne peut pas se permettre la colère et rétrécir son cercle d’influence ». Et une dernière pour la route, « n’embrassez pas la bague ».
En effet,si tout le monde ne peut pas se tenir debout et se battre, personne n’est obligé de plier le genou.
L'Empire contre-attaque
Que retenir des idéologues du Nouvel Empire trumpiste ?
Parmi les plus influents, le néo réactionnaire Curtis Yarvin entend mettre fin « à l'expérience démocratique ratée » des deux derniers siècles. Dès 2007, il prophétise le jour (nous y sommes) où les maîtres du web domineront les citoyens ordinaires sans droits et les non productifs qui jouent dans les caves. Fils de Matrix et de Star Wars, celui qui se surnomme « le seigneur Sith » défend un techno-monarchisme où se mêlent l'histoire médiévale et l'heroic fantasy. Cela serait seulement grotesque s’il ne s’agissait pas de la réalité d’aujourd’hui et si cela n’était pas sérieusement cité par le vice-présidentVance.
Ils sont nombreux à partager ce profil et ces références, hommes du côté obscur de la Force, plus ou moins proches du nouveau pouvoir ou déjà aux commandes. Geeks et blogueurs plutôt que penseurs, surpris de voir leurs rêves devenir réalité.
Entre le Nouvel Ordre et l’Empereur Sith, on préfère Luke Skywalker.
Joindre les deux bouts de l'Univers
Certains magnats de la tech voient dans la conquête de l’espace un levier de puissance. D’autres diront que penser à l’espace, c’est oublier de se préoccuper de la Terre.
Frédéric Neyrat, philosophe, propose une autre voie : l’univers nous apporte une ouverture philosophique pour décentrer notre perception du monde. [1ère taffe sur le Oinj, ça va nous aider à comprendre] : Penser la vie extra-terrestre modifierait par exemple la manière dont nous appréhendons le vivant terrestre et permettrait de faire l’expérience d’un imaginaire en dehors de l’immédiateté. Forcés par l’urgence, nous nous privons d’une vision élargie et universelle, qui nous aiderait à remettre en cause les liens « qui nous oppressent et nous aliènent ». [2ème taffe sur le Oinj, on n’y est toujours pas].
Cela permettrait en outre d’habiter une conception écologique de l’espace, comme pensée résistante à celle des « astro-capitalistes ». [Ça vient, je crois]. La vision est certes expérimentale par rapport aux préoccupations très immédiates du réchauffement, mais c’est justement son abstraction qui doit nous faire prendre de la hauteur.
Pour penser la Terre et l’espace à la fois, dans une forme de big-bang écologique. [Eureka ?]
Ronds-de-cuir management
L’État est un mauvais employeur et le changement n’est pas pour tout de suite.
Deux enquêtes redessinent l'image générique du fonctionnaire françaisau profit d'un patchwork d'agents aux attentes très hétérogènes. La désaffection pour la fonction publique n'est pas uniforme, mais le nombre moyen de candidatures par poste est passé de 16 en 1997 à 6 en 2022. Il n'y a pas aujourd'hui moins d'agents de l’État– ils sont 5,6 millions –, mais un quart d’entre eux sont en CDI, hors statut.
Parmi les raisons invoquées pour devenir fonctionnaire, le statut, les valeurs du service public et la sécurité de l'emploi arrivent loin derrière l'équilibre travail-vie privée et le contenu des missions qui font accepter des salaires 30 % inférieurs à ceux du privé.
On déplore des concours difficiles pour des catégories opaques et des promotions lentes. Un toilettage RH et la promotion de la marque employeur ne sauraient suffire, alors qu’un relèvement des salaires ne semble pas d'actualité.
Autant faire entrer des ronds dans des carrés.
Drill Baby Drill !
Trump revient, drill baby drill, business first, show must go on & profits up. Voilà l’humeur paradoxale des dirigeants à Davos, semble-t-il. Paradoxal, dites-vous ?
D’un côté, plus de la moitié des dirigeants du monde se disent « très confiants » quant à l’évolution de l’économie mondiale dans l’année à venir. De l’autre, la facture environnementale sera toujours plus salée à moyen terme pour les entreprises… mais peu le voient ou le savent : le coût ira jusqu’à -25 % d’EBITDA (-15 % pour les entreprises européennes) à horizon 2050, à cause des coûts physiques du changement climatique auxquels il faudra ajouter les coûts de transition (WEF & BCG). Pour l'économie dans son ensemble, la fourchette variera de -0,4 points de croissance par an pour les optimistes (WEF & BCG) à -20 % en 2050 et jusqu’à -50 % à la fin du siècle pour les autres (Bilal et al, Kotz et alii, IFoA).
Pendant que les patrons du monde se réjouissent, les patrons français restent pessimistes… Ce n’est pas tant à cause des coûts écologiques que du sort de la France. On peut toujours compter sur nous pour broyer du noir ! Les patrons français sont aussi plus conscients que les autres (pour les 2/3 d’entre eux) que leur modèle économique actuel ne sera plus viable d’ici 10 ans.
À force d’envisager le pire, on a parfois raison. Forer et rester au fond.
Les associés de Kéa
Vous appréciez ce bulletin ? N'hésitez pas à le partager autour de vous.
Secrétaires de rédaction : Marie Guilbart, Wendy Röltgen
Ont collaboré à ce numéro :Oualid Essaid, Carine Lesigne, Irène Miquel, Stéphanie Nadjarian, Yves Pizay, Paul Puechbroussou, Chloé Secnazi, Jérémie Viel
Directrice de la diffusion : Iliana Ohleyer
1er cabinet de conseil "société à mission", le Groupe Kéa est reconnu pour apporter aux dirigeants des solutions créatives et trouver les modèles qui feront l'économie de demain. Sa raison d'être : entreprendre les transformations pour une économie souhaitable.