En tant qu'Entreprise à mission, Kéa a décidé de contribuer à sa manière aux grands sujets économiques & sociétaux et propose un décodage inédit.
Chers lecteurs,
En cette semaine de visite présidentielle en Corse, les associés de Kéa, pas tous des pinzutu, s’essaient à l’art de la magagne et vous proposent le décryptage suivant :
Une servante pas si écarlate
La Terre se meurt et vous vous sentez spectateurs d’un drame annoncé ? Votre démocratie vous paraît trop passive, guidée par des intérêts privés antiécologiques ? Vous croyez que l’autoritarisme ou le fascisme écologique seront à terme le seul recours possible ? Jan-Werner Müller, professeur de sciences politiques à Princeton, rappelle au contraire qu’essentiellement guidés par leurs intérêts propres, les régimes autoritaires et autres autocrates de classe mondiale ne passent pas pour les meilleurs défenseurs de la nature et de ses activistes. Optons pour une technocratie efficace, dans ce cas ! Qu’il s’agisse de Pisani-Ferry et Mahfouz ou du Conseil Economique Social et Environnemental (CESE), les experts du financement de la transition écologique sont unanimes : en la matière, le premier enjeu est celui de l’équité. Pour Thierry Baudet, président du CESE, la solution ne peut être qu’une démocratie renouvelée, plus participative, qui renouerait avec sa promesse d’efficacité, de justice et de sécurité, et dont le succès nous permettrait de cesser de jouer avec les limites planétaires. Un système politique qui s’érigerait alors en nouveau modèle de société fondé sur un cercle vertueux alliant démocratie et écologie. Blessed be the fruit.
Industrial Love
La réindustrialisation est désormais une réalité : elle est en marche et rien ne l'arrêtera. Adoptons une perspective historique : les « Trente Glorieuses » ont fait culminer la part de l'industrie dans le PIB à 41 % en 1973. Puis la France (offrant « qualité espagnole et prix allemands » selon une boutade de Jérôme Fourquet) a connu une désindustrialisation particulièrement violente et durable, vécue comme une inexorable fatalité. Aujourd’hui, depuis le tournant Montebourg-Macron sous Hollande, accéléré pendant la COVID, quand les masques, le doliprane et – pire – la moutarde, manquaient, l’heure n'est plus à échanger Billancourt contre Disneyland mais à refonder l'industrie. La substance de la puissance nationale est restée industrielle dans l'imaginaire français. L'opinion avait mal à son industrie. Elle a donc été rapidement convertie. Des petits ruisseaux (Mecanic Vallée à Figeac) aux grandes rivières (Giga factories de l'Isère et du Nord), Nicolas Dufourcq insiste « les balles sont neuves » : croissance décarbonée, jeunes ingénieurs, grande diversité des métiers, circuits courts, chaînes de valeur, French Tech et souveraineté. Choose France !
Cherche migrants désespérément
Loin des crispations identitaires et des débats sur l'article 3 de la Constitution, une série d'articles du Monde illustre le besoin d'immigrés partout dans une Europe en déclin démographique. En France, 39 % des employés de maison, 28 % des agents de sécurité, 24 % des ouvriers du BTP et 17 % des médecins hospitaliers sont des immigrés, sans parler du monde, sombre, de l'emploi des sans-papiers. Partout, les employeurs peinent à recruter. L'Allemagne propose la double nationalité aux « travailleurs invités ». La Flandre, après avoir tout essayé, recrute Indiens et Mexicains avec des contrats de travail temporaire. La Croatie va chercher des saisonniers philippins qui débarquent par avions entiers. La Hongrie et la Pologne, malgré des discours et des lois nationalistes, multiplient les invitations aux travailleurs étrangers. La clé de réussite de ces migrations résidera sans doute dans un effort collectif de formation élevant les qualifications et facilitant l'intégration. Et si « toute la misère du monde » devait nous rendre prospères ?
50 nuances de vert, plus claires
Concilier écologie et paix sociale, c’est le retour du mantra de l’écologie « non-punitive » au gouvernement. Après une année de travail consistant à rendre tangibles des tableaux Excel et des trajectoires, le Secrétariat Général à la Planification Ecologique (Matignon) a présenté 50 leviers pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Un plan, une multitude de chantiers, un horizon (2030) et un budget de 7 milliards d’euros.Ce qui ressort néanmoins de ce coup de clairon gouvernemental, c’est la conception présidentielle de l’écologie : « positive », de « progrès », ligne de crête entre « une écologie du déni » et « une écologie de la cure » incarnées à l’Est et à l’Ouest du centre gouvernemental. Toutefois, comme le rappelle l’astrophysicien Aurélien Barrau, tant que le pilonnage systématique de la biosphère demeure le geste cardinal, le caractère biodégradable du projectile n’a pas beaucoup d’importance. Alors oui, soyons positifs et non punitifs, mais dévions le tir.
Critique de la raison moins pure
Pour renforcer notre esprit critique, nous devons apprendre à penser contre nous-mêmes. C’est en substance l’enseignement de « Comment raisonne notre cerveau », ouvrage que vient de publier le neuropédagogue français Olivier Houdé. S’inscrivant dans la lignée de Daniel Kahneman (psychologue et lauréat du prix Nobel d'économie en 2002), qui a théorisé les systèmes 1 (intuitif et rapide, machine à tirer des conclusions hâtives) et 2 du cerveau (analytique et lent), Olivier Houdé décrit la façon dont notre esprit succombe, généralement par paresse, à la tentation de bouder le second au profit du premier. La nouveauté de son analyse réside dans la découverte d’un 3ème système, le contrôle inhibiteur, jouant un rôle essentiel dans la transition du système 1 au système 2 – et guidé par des émotions telles que le doute, le regret et la curiosité. D’où l’importance pour Olivier Houdé, qui fut autrefois instituteur, de développer à l’école, en complément de l’enseignement de la logique, des outils pédagogiques permettant aux élèves de contrer leurs biais cognitifs et ainsi les aider à réfléchir de manière critique. Allez, on pense à bien s’inhiber avant de sortir.
NB : Ce bulletin est rédigé par les équipes de Kéa Bonne lecture,
Les associés de Kéa
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Rédacteurs : Alexis Heuls, Mathieu Noguès, Pierre Girard, Chloé Secnazi, Marie Guilbart
Secrétaires de rédaction : Laura Istace, Wendy Röltgen
ont collaboré à ce numéro : Stéphanie Nadjarian, Thibaut Cournarie, Yves Pizay, Jean Gaboriau, Romain Thievenaz, Benjamin Toison
Directrice de la diffusion : Iliana Ohleyer
1er cabinet de conseil européen "société à mission", le Groupe Kea est reconnu pour apporter aux dirigeants des solutions créatives et trouver les modèles qui feront l'économie de demain. Sa raison d'être : entreprendre les transformations pour une économie souhaitable